Demain, des autos plus silencieuses… à quelques exceptions près !

Porsche 911 GT3

Porsche 911 GT3

Je vous en parlais il y a un peu plus de deux ans (déjà !) : l’Union Européenne voulait mettre nos voitures en sourdine. C’est désormais fait, puisque le Parlement européen a adopté de nouvelles règles en matière de bruit produit par les véhicules, avec pour objectif de le réduire – en plusieurs phases – de jusqu’à 6 dB à l’horizon 2024. Mais que les amateurs de sportives se rassurent : grâce notamment au lobbying de Porsche, les bolides bénéficieront d’un traitement de faveur. Ce qui hérisse les élus écologistes !

Selon une étude publiée en 2011 par l’OMS, le bruit généré par le trafic routier serait responsable de la perte d’un million « d’années de vie en bonne santé » dans toute l’Europe occidentale. Troubles du sommeil, stress : les effets du brouhaha des axes de circulation majeurs sont bien connus des médecins. Toujours selon l’OMS, 1,8% des crises cardiaques en Europe de l’Ouest seraient liées à un niveau sonore du trafic supérieur à 60dB. L’ONG Transport & Environnement va encore plus loin : dans une étude de 2008, elle affirme que la « pollution sonore » est la cause de 50 000 décès par crise cardiaque chaque année en Europe et de 5 % des accidents vasculaires cérébraux. En Île-de-France, le phénomène du bruit est dûment cartographié par l’organisme Bruitparif. Côté homologation, les dernières normes de bruit pour les véhicules remontent à 1996 et n’ont pas évolué depuis, alors que la congestion s’est aggravée.

Photo CC Yardley/Flickr

Photo CC Yardley/Flickr

On s’en doute, avec la question du bruit on touche un sujet épineux. Pour la majorité de nos concitoyens, le son d’un véhicule est une nuisance supplémentaire, un bruit de fond qu’il faut taire (et vu notre parc automobile français saturé de claquants diesels, on ne peut pas leur donner tort !). A l’inverse, pour le passionné, le bruit est un facteur important du plaisir de conduite : que serait une Porsche 911 sans le son métallique de son « flat-6 » ? Un BMW dépourvue des harmoniques d’un soyeux 6 cylindres en ligne (quoique, ça commence à venir) ? Une grande GT Ferrari dont le V12 serait devenu muet ? Pour l’amateur de belles mécaniques, ce serait un renoncement insupportable.

L'image sans le son. Rageant, non ?

L’image sans le son. Rageant, non ?

Bref, le débat a été houleux, entre mouvements écologistes soutenant une norme très stricte et certains constructeurs automobiles pris en flagrant délit (mais est-ce un délit ?) de lobbying. En septembre 2012, une association révélait ainsi que l’une des annexes très techniques du projet de loi avait été écrite par… un salarié de Porsche. Forcément, ça fait mauvais genre.

Ça fait désordre...

Ça fait désordre…

Il aura donc fallu encore un an et demi pour parvenir à un compromis acceptable par la majorité du Parlement européen, un compromis qui « va contribuer à la protection de la santé de nos concitoyens européens […] sans entraîner aucune perte de compétitivité pour l’industrie automobile européenne », pour reprendre les termes du rapporteur de la loi, le tchèque Miroslav Ouzký.

L'évolution des normes européennes de bruit

L’évolution des normes européennes de bruit

Concrètement, la nouvelle loi prévoit d’adopter un nouveau protocole de mesure, supposé être plus représentatif que le précédent, et acte une baisse de 74 à 68 dB en plusieurs phases (70 dB dès 2016, 69 en 2020 et 68 en 2024 pour les véhicules répondant à un nouveau type d’homologation, les autres ne devant attendre les 68 dB qu’en 2026). Surtout, le législateur a prévu des « marges » pour certains véhicules suivant leur poids et leur puissance. Par exemple, les modèles développant plus de 250 kW (soit 340 chevaux) pourront émettre 77 dB, soit… davantage qu’aujourd’hui ! Un dispositif taillé sur mesures pour la Porsche 911, qui démarre actuellement à… 350 chevaux.

L'échelle des décibels (CC Wikimedia Commons/PolBr)

L’échelle des décibels (CC Wikimedia Commons/PolBr)

On l’imagine, ce « détail » a suscité la colère des députés verts du Parlement qui, dans un communiqué, vilipendent une « victoire pour le lobby des voitures bruyantes aux dépens de la vaste majorité des citoyens européens et de la santé publique. » Il convient cependant de relativiser l’impact de ces exceptions : pour donner un ordre d’idée, les 51 049 voitures vendues en 2013 par Porsche sur le Vieux continent ne représentent que… 0,43 % du marché européen. Et, après tout, l’important n’est-il pas de réduire les nuisances de l’essentiel du parc, constitué avant tout de « déplaçoirs » à vocation strictement utilitaire ?

10 thoughts on “Demain, des autos plus silencieuses… à quelques exceptions près !

  1. Le lobbying permet aux plus riches et aux plus puissants d’imposer leurs points de vue à la majorité de la population, avec l’aide de fonctionnaires et politiques corrompus. Tous ces gens bénéficient, entre autre, de remises exceptionnelles
    à l’achat d’un véhicule et certains d’entre eux ne se contentent pas seulement de cela. Ce n’est pas la première fois que les lobbyistes rédigent directement des projets ou directives (cfr Louis Michel et son attaché parlementaire fusible).
    Seuls quelques naîfs ou imbeciles et/ou béneficiaires de ce lobbying peuvent croire que tout cela n’a rien a voir avec de la corruption.

    • Comme d’hab , une belle brochette de commentaires débiles..c’est la lutttttttte finale … tous en trabant; ça fait pas de bruit une trabant??

    • Le lobbying est un élément anti-démocratique avéré. C’est en soi scandaleux. Ce qui l’est d’avantage encore, c’est la façon dont il est institutionnalisé, il suffit de constater à quel point les lobbies ont pignon sur rue auprès des institutions européennes. J’ai de la peine à concevoir que cette position de force des lobbies soit obtenu autrement que par des largesses suspectes.
      Ce qui est à mon avis tout aussi scandaleux, dans un domaine tres différent, c’est que certains beaufs aient besoin de polluer la vie des citoyens en leur imposant le vacarme d’un véhicule dont ils pensent qu’il les valorise. Si Porsche est aussi adroit qu’il le prétend, il doit savoir reproduire à l’intérieur du véhicule un son qui flatte l’ego imbécile du conducteur, des systèmes audio y parviennent très bien désormais, sans imposer le « bruit métallique » à tout l’environnement. Mais il est vrai que le premier plaisir de rouler en Porsche est de se faire remarquer…jusqu’où va se loger la bêtise humaine…

  2. Ouf j’ai eu peur, la règlementation ne s’appliquera qu’à des petits péquenots dans mon genre. Heureusement les friqués ont été protégés par leur lobbying.
    On devrait également remettre au goût du jour la suggestion du prince Laurent de Belgique: supprimer les limitations de vitesse pour les plus nantis.
    Pourquoi des firmes comme Porsche n’inventent-elles pas une sonorisation débrayable interne au véhicule?

  3. Le bruit de fond d’une circulation intense ne provient pas principalement du bruit des moteurs mais du bruit produit par le roulement des pneus sur la chaussée. Bruit qui dépend du type de revêtement de la route et du type de pneus utilisés.
    Perso, le bruit d’une Porsche, d’une Ferrari, d’une Lambo, d’une AMG 6.3, d’une RS6 ou encore d’un bon big bloc V8 us…Ce n’est pas du bruit mais une musique…
    Par contre, les petits deux cylindres et les trois cylindres qui turbine comme des tondeuses à gazon, çà c’est du bruit…

  4. Alain à raison et la plupart des V6 ou V8 essence sont bien plus silencieux que les 4 cylindres diesels. Roulez en Cadillac vous verrez si ca fait du bruit. Si on veut plus entendre le moteur faudrait rendre le V8 obligatoire.
    C’est les pneus qui créent le « brouhaha » urbain. Et puis on est pas à Dubai, tout le monde ne roule pas en Porsche ou en Lamborghini.

  5. Il y a longtemps que ce problème aurait du être abordé et je suis partiellement d’accord avec les avis ci dessus, même si je trouve désolant qu’on autorise certaines marques à faire plus de bruit que maintenant. Mais si on commençait par s’attaquer au motos pétaradantes (petites ou grosses) aux véhicules lourds (camion, tracteurs, etc) y compris les bruits de freins, les remorques qui rebondissent, alors seulement il serait utile et efficace d’affiner en réduisant le bruit des voitures NON trafiquées.

    • C’est déjà le cas aujourd’hui avec un son « débrayable », mais dans l’avenir il me semble que ça va devenir obligatoire. Sur la mienne, c’est devenu un réflexe… je coupe le son avant chaque départ!

  6. Personnellement je fais le grand écart : je possède un véhicule électrique (très silencieux) et une sportive des années 80, dont la carte grise indique 92db à 4750tr/min.
    Je peux affirmer que sur les véhicules modernes, le bruit principal vient du frottement des pneus sur la route et de l’écoulement de l’air. Ce sont des sons peu harmonieux, qui peuvent vite devenir énervant quand on se focalise dessus. Malheureusement, il n’y a pas grand chose à faire, si se n’est des revêtements de route silencieux… qui ont tendance à devenir glissant sous la pluie. 🙁
    Comme indiqué dans les commentaires, le son du moteur fait parti du plaisir de rouler en sportif. Je ne vois pas où il y a le problème d’avoir un véhicule silencieux pour faire les trajets quotidiens et un véhicule plaisir pour les grands espaces le Week-end. A noter: pour qu’une sportive « chante », il faut faire « ronfler » le moteur… et la police peut très bien verbaliser pour « usage inapproprié du véhicule » surtout en ville passé 22h. Alors qu’on laisse des niches pour que l’automobile puisse toujours être passionnante, c’est très bien… j’aurais même abaissé le seuil à 220cv, pour que les petites sportives françaises puissent encore Vivrent.

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