Que celui qui n’a jamais proféré d’insulte, même à voix basse contre un autre automobiliste ou effectué une manœuvre « un peu limite » au volant lève la main. De plus en plus de Français trouvent les conducteurs agressifs. Une simple impression ou un constat justifié ?
Une transformation du stress
Augmentation du trafic, arrivée de nouveaux moyens de locomotion et peur du gendarme font de la conduite automobile une activité de plus en plus stressante. Au point que certains y renoncent purement et simplement. Mais, pour la majorité, pas question de se passer de sa voiture. Il faut donc composer avec ce stress et le gérer comme on peut. Si, la plupart du temps, celui-ci reste contenu, dans quelques cas, il se transforme en agressivité. Queues de poisson, appel de phares, coups de klaxon… sont le lot quotidien. Mais, parfois, la situation s’envenime. On insulte alors les autres usagers de la route. Dans le meilleur des cas, dans l’intimité de son habitacle, mais, parfois, en ouvrant la fenêtre afin de faire savoir tout le bien que l’on pense de cet autre. Pire encore, il peut arriver que certains en viennent aux mains, occasionnant parfois de graves blessures voire, dans de très rares cas, la mort.
Mais que se passe-t-il dans le cerveau des automobilistes ? Leur comportement a-t-il tant changé ces dernières années ? Et, le cas échéant, les conditions de circulation sont-elles seules responsables de la hausse de cette « violence » ? Comme chaque année depuis une décennie, Vinci Autoroutes a publié, il y a quelques mois, son baromètre de la conduite responsable. Et certaines de ses conclusions font froid dans le dos.
Une conduite aux conséquences potentiellement désastreuses
Un Français sur cinq ne se reconnait pas lorsqu’il est au volant. C’est l’un des constats faits par le 10è baromètre annuel de la conduite responsable, publié par la Fondation Vinci Autoroutes. Pour la première fois, ce sondage, réalisé auprès de 12 400 automobilistes de 11 pays européens différents, interrogeait ainsi ces sondés sur leur état d’esprit lorsqu’ils conduisent. Et il en ressort que 21% d’entre eux considèrent être plus agressifs lorsqu’ils sont au volant qu’en temps normal. Un chiffre qui grimpe même à 28% concernant les automobilistes franciliens. La conduite urbaine rend-elle encore plus fou ?
Selon une autre étude, réalisée cette fois-ci par Artemik pour le compte d’Autoescape, 74% des Français interrogés se mettent au moins une fois par mois en colère alors qu’ils se trouvent au volant. Les principales raisons invoquées sont le non-respect du code de la route par d’autres automobilistes dans 69% des cas, les embouteillages pour 38%, les conducteurs peu sûrs d’eux et le non-respect des limitations de vitesse pour 37% et ceux qui roulent trop lentement pour 32%. En résumé, l’enfer, et la source de la colère sur la route, ce sont les autres.
Continuons ce terrifiant inventaire en signalant, selon la Fondation Vinci Autoroutes, que 56% des Français klaxonnent les automobilistes qui les énervent, 34% les « collent » et 18% descendent carrément de leur voiture pour s’expliquer. Cela fait des conducteurs hexagonaux les deuxièmes pires d’Europe, juste derrière les Grecs. Une médaille d’argent dont on se serait franchement passer.
Parmi les infractions le plus souvent reconnues par nos compatriotes, on note les excès de vitesse pour 91% d’entre eux, l’oubli du clignotant pour dépasser ou changer de direction pour 57% et l’envoi de mails ou de SMS pour 27%. Des comportements inappropriés qui engendrent fatalement des accidents parfois graves.
Pour l’anecdote, l’étude Artemik pour Autoescape a fait le classement des marques que conduisent les conducteurs les plus agressifs. Le top 5 est ainsi constitué des propriétaires d’Audi, Kia, BMW, Mercedes et Chevrolet. En fond de tableau, on trouve les possesseurs de Volkswagen, Renault, Ford, Peugeot, Nissan et Toyota. Sachant que, dans tous les cas, les hommes sont plus coutumiers de ce comportement que les femmes.
Comment lutter contre ce fléau ?
Selon une étude d’Auto Europe, un conducteur est, en moyenne, confronté 4 556 fois durant sa vie d’automobiliste à des situations d’agressivité. La solution la plus « évidente » pour se prémunir de ces comportements est de limiter le temps de conduite. Facile à dire, mais presque impossible à faire pour la majorité d’entre nous. Aussi, il est préférable de fuir au maximum les conducteurs infréquentables. Par exemple en anticipant et en observant le plus possible les autres véhicules. Si vous remarquez un comportement potentiellement dangereux, prenez le plus de distance possible. Ainsi, sur autoroute, pourquoi ne pas vous arrêter quelques minutes sur l’aire la plus proche afin de laisser ce(s) conducteur(s) imprudent(s) prendre quelques kilomètres d’avance. Mais si vous vous retrouvez agressé par un autre conducteur, restez le plus calme possible, évitez de lui répondre et laissez le se lasser. Si vous percevez que la situation peut dégénérer, en violence physique par exemple, enfermez-vous dans votre voiture et contactez les forces de l’ordre.
Quelques méthodes simples existent également afin que votre stress n’augmente pas lorsque vous conduisez. Se préparer une playlist de ses morceaux favoris est une bonne méthode, surtout si ceux-ci sont plutôt calmes. Il est ainsi prouvé que l’écoute de musiques « agressives », telles que le hard-rock ou la techno, influe négativement sur notre comportement. Et si vous vous sentez stressé avant même de prendre le volant, retardez votre départ autant que possible et profiter de ce temps pour réaliser des exercices de relaxation. De telles pratiques sont également conseillées lors des longs trajets. Profitez de la pause « obligatoire » toutes les deux heures pour y consacrer 5 à 10 minutes. Sachez également que la fatigue augmente potentiellement le stress.
Conscient du problème, les pouvoirs publics tentent de limiter ce type de comportement. Ainsi, dans les années 1990, les autorités belges avaient installé, à Bruxelles, des panneaux contre l’agressivité au volant. Malheureusement, les résultats de ce type de campagne de sensibilisation restent très contrastés. En Suède, depuis 2006, des cours de maitrise de ses pulsions font partie intégrante de la formation au permis de conduire. Enfin, mettre en place des mesures afin de réduire les embouteillages et améliorer la synchronisation des feux de circulation sont également des méthodes qui ont fait leurs preuves.