Je renoue avec ma série de billets de la catégorie « Futur Antérieur« , où je retrace les grandes étapes qui ont marqué l’évolution technologique de nos voitures. Au programme de ce billet : la légendaire Citroën Traction Avant, qui fête ses 80 ans en 2014 ! Si elle ne fut pas la première voiture de série à être propulsée par ses roues antérieures, la « Traction » n’en représente pas moins un bond en avant pour l’automobile d’avant-guerre, en combinant en un seul modèle toutes les innovations technologiques de l’époque.
En Europe, les effets de la crise de 1929 ne se font ressentir qu’à partir de 1931, mais ils sont terribles, notamment pour l’industrie automobile. Poursuivant une politique d’expansion à marche forcée, la marque Citroën est très endettée, et donc fragile. En 1934, la Banque de France publie un rapport alarmiste sur l’état de l’entreprise, qui accumule les pertes. Les banques créancières placent la firme sous la tutelle de Pierre Michelin, qui doit redresser l’entreprise.
Entre temps, André Citroën tente son va-tout : comme toujours, il espère s’en sortir par le haut, en lançant un modèle révolutionnaire. En mars 1933, il a débauché l’ingénieur André Lefebvre chez Renault, et lui laisse les mains libres pour exprimer sa créativité. Avec le styliste Flaminio Bertoni, Lefebvre avance à marche forcée, si bien que la nouvelle auto est présentée à la presse à pleine plus d’un an plus tard, le 18 avril 1934, à Paris.
Côté style, cette « Citroën 7 » (pour 7 chevaux fiscaux, l’appellation « Traction Avant » viendra plus tard) arbore des lignes empreintes d’aérodynamisme. Par rapport à la Rosalie, ses ailes sont mieux intégrées, son toit est plus bas, sa partie arrière plus fuyante.
Sur le plan technique, donc, l’innovation de la Citroën 7 n’est pas au niveau de sa transmission – les britanniques d’Alvis et les américains de Cord avaient déjà dégainé des tractions avant en 1928 et 1929 – mais plutôt dans sa combinaison harmonieuse de technologies dernier cri. Dans le détail, on recense :
- les roues avant avant motrices, type de transmission encore rarissime à l’époque,
- une structure monocoque, où le moteur et les liaisons au sol sont directement boulonnés sur la carrosserie, et non sur un lourd châssis séparé comme c’était alors généralement le cas,
- des freins à tambours à commande hydraulique,
- suspensions avant indépendantes,
- moteur « flottant » pour limiter les vibrations.
Avec son centre de gravité bas, ses suspensions sophistiquées et son freinage performant, la Traction Avant se taille très vite une réputation en matière de tenue de route. Au point d’être prisée des malfrats : un célèbre gang lui empruntera son nom dans l’immédiat après-guerre. Mais elle sera aussi l’un des véhicules préférés de la Résistance durant l’Occupation… précisément pour les mêmes raisons.
Car la Traction connaîtra une longue carrière, étant produite de 1934 à 1957, sous de nombreuses versions et variantes, dont des cabriolets aujourd’hui très recherchés, ainsi que la 15-Six, version luxueuse motorisée par un 6 cylindres en ligne. Un prototype de Traction à moteur V8, la 22, fut même étudié peu avant la guerre.
Aujourd’hui encore, la Traction impressionne. Son espace intérieur, son confort, la sérénité de son comportement routier ou encore son freinage très efficace pour l’époque en font toujours une « Reine de la route », comme on la surnommait alors. Ayant eu la chance d’occuper pendant quelques kilomètres la banquette arrière d’une majestueuse 15-Six, je peux également témoigner de l’incroyable souplesse du 6 cylindres 2,9 litres et de ses performances encore très actuelles !
Mais en dépit de toutes ses qualités, la Traction Avant n’aura pas sauvé André Citroën : développée à la va-vite, elle est frappée à son lancement par de gros problèmes de fiabilité (cardans fragiles, coque pas assez rigide, moteur et boîte capricieux). Des débuts difficiles qui vaudront à la marque aux Chevrons de basculer dans l’escarcelle de Michelin en 1935, année où André Citroën succombe d’un cancer de l’estomac. L’ingénieur André Lefebvre passera lui l’essentiel de sa carrière chez Citroën, où il créera notamment les mythiques 2CV et DS.
Produite à près de 760 000 exemplaires au total, la Citroën Traction est un « collector » accessible : comptez 5 000 € pour un modèle à restaurer, 10 000 à 15 000 € pour une 7 en bon état et jusqu’à 30 000 € pour une 15-Six en état concours (rajoutez encore 5 000 € supplémentaires pour une des 3 000 Citroën 15-Six H à suspension arrière hydropneumatique). Seuls les très rares coupés et cabriolets sont inaccessibles, avec une cote pouvant atteindre les… 150 000 € !
la traction navait pas der freinage assisté. le freinage était assez efficace comme il était conçu. pour avoir un ‘effet freinage assisté’ il suffit de monter des garnitures noires et la voiture freine aussi facilement et efficacement comme une voiture moderne avec freins assistés, sans besoin d’un ‘pied lourd’.
Bonjour Stefan. Merci pour cette précision importante : j’ai corrigé la coquille dans le texte.
Je pense qu’a coté de Cord et Alvis dans votre article on pourrait aussi mentionner la marque Tracta de l’ingénieur français Gregoire. Un des pemières voitures réellement performant avec traction avant et ceci des 1923.