Le carbone reste encore indéfectiblement lié à l’univers de la compétition et des voitures les plus sportives. Pourtant, sa démocratisation est en marche, au point d’en faire un matériau comme un autre, un outil de plus pour concevoir des structures aussi rigides, mais plus légères. Un matériau tellement « ordinaire » qu’il ne se montre plus !
L’histoire retiendra que la McLaren F1 fut la première automobile à employer un châssis entièrement réalisé en plastique renforcé à la fibre de carbone (PRFC). Une supercar mythique, réalisée sans la moindre considération de coût de revient. Dans le sillage de la F1, la fibre de carbone est longtemps restée l’apanage des sportives les plus exclusives et inaccessibles.
Mais les temps changent, et une véritable filière industrielle s’est développée autour du carbone, poussée par la nécessité de réduire les émissions de CO2. En effet, la réduction du poids est un excellent moyen d’améliorer son bilan carbone (en plus d’optimiser le comportement routier et le freinage) : 100 kg en moins sur la balance, c’est environ 10 g/km de CO2 d’économisés. Du coup, les constructeurs ont investi dans de nouvelles usines pour produire de la fibre de carbone à grande échelle, abaissant d’autant son prix de revient. Résultat, le PRFC est descendu en gamme.
Le carbone descend d’autant plus en gamme qu’il s’associe le plus souvent à d’autres matériaux. Ainsi, l’Alfa Romeo 4C associe une baignoire en PRFC à des ensembles avant et arrière en aluminium et à une carrosserie en plastique. Les nouvelles Lamborghini Huracan et Audi R8 marient quant à elles l’aluminium et la fibre de carbone. Idem pour les BMW i3 et i8 : le châssis intégrant les batteries est en alu, le reste en PRFC.
Mais avec la future Série 7, BMW va franchir une nouvelle étape. Cette fois, le carbone va véritablement se banaliser, devenant un matériau composant la coque comme un autre. Caché à la vue, il vient en complément des aciers modernes à haute limite élastique et de l’aluminium pour renforcer la cellule de survie au niveau du toit, des montants latéraux, du tunnel de transmission ou de la plage arrière. En cela, la Série 7 marque le début d’une véritable démocratisation de la fibre de carbone, comme la Mercedes Classe S a amorcé en son temps la démocratisation de l’ABS ou de l’ESP, désormais en série sur toutes les voitures modernes. Gageons que, dans les prochaines années, le PRFC pourra même équiper une simple Clio !
Pour autant, on imagine mal les coques 100% carbone devenir à terme la norme sur les modèles de grande production. D’abord, parce qu’il reste toujours moins coûteux d’emboutir une pièce en tôle (d’acier ou d’aluminium) que de la réaliser en fibre de carbone, même avec le procédé RTM (pour « Resin Transfer Moulding »), qui permet de diviser par deux le coût de revient.
Ensuite, parce que, contrairement à l’acier ou l’aluminium, le carbone ne se répare pas. Les spectateurs du sport automobile le savent bien : lorsque deux Formule 1 se percutent, elles se disloquent littéralement dans un nuage de petits morceaux de carbone. Sur une voiture de tous les jours avec une carrosserie en PRFC, le moindre petit accrochage nécessiterait le coûteux remplacement d’une ou plusieurs pièces. Sans parler de l’impossibilité de passer le châssis au marbre en cas de choc plus important ! Bref, le carbone restera cantonné à quelques pièces de carrosserie et au renfort de la cellule centrale de la coque. Mais il va devenir incontournable !
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