Les phares servent à mieux voir et être vu. Mais ils sont aussi un puissant outil pour les designers et gens du marketing automobile, en suggérant à la fois l’élégance et le raffinement technologique. Les constructeurs l’ont bien compris et multiplient les innovations dans ce domaine, autant pour améliorer la sécurité active que pour inventer de nouveaux langages en matière de style automobile.
Deux phares et une calandre, comme deux yeux et une bouche. Des yeux qui peuvent être rieurs ou menaçants, une bouche amusée ou faisant au contraire la grimace. Depuis bon nombre d’années, les designers automobiles utilisent ces éléments incontournables pour donner de la personnalité à leur créations, dans un contexte de concurrence acharnée et de solutions techniques qui tendent vers une certaine uniformité du style des voitures modernes.
Dans un premier temps, cependant, c’était la recherche de l’efficacité qui primait. Les premiers phares électriques succédèrent ainsi dans les années 1910 aux lampes à acétylène, elles-mêmes remplacée à partir des années 1960 par les phares halogènes. Puis vint enfin la mode des ampoules à décharge (le plus souvent au Xénon), qui remplaçaient le filament par un arc électrique produisant une plus grande quantité de lumière. Plus efficace, plus durable : le phare au Xénon était le must dans les années 90 et 2000.
En 2008, l’Union Européenne vota une loi pour rendre obligatoire l’éclairage de jour sur les nouveaux modèles lancés à partir 2011. Cela aurait pu être une contrainte pour les constructeurs : en termes de style, mais aussi de consommation de carburant. Avoir des ampoules allumées en permanence augmente la puissance que doit fournir l’alternateur, ce qui accroît la charge moteur. Ajoutez-y l’augmentation simultanée des émissions de CO2, et vous obtenez un vrai casse-tête écologico-fiscal.
Heureusement, une nouvelle technologie d’éclairage était prête à débarquer : les diodes LED. Nettement moins énergivores que les ampoules (halogènes ou à décharge), les LED étaient toutes indiquées pour l’utilisation comme éclairage de jour. Certains constructeurs, Audi en tête, s’en sont donnés à cœur joie en utilisant des guirlandes de diodes comme signature visuelle de leurs modèles, instantanément reconnaissables de jour comme de nuit. Si bien qu’aujourd’hui, même d’humbles citadines bénéficient de leurs « moustaches » lumineuses. Les marques « premium » doivent donc trouver d’autres moyens de se distinguer.
Elles ont déjà commencé en étendant les LED à toutes les fonctions d’éclairage. L’actuelle Mercedes Classe S restera ainsi dans l’histoire comme la première auto à être totalement dépourvue d’ampoules conventionnelles, puisqu’elle utilise des LED comme unique source de lumière, des plafonniers aux feux de route. Les plus aventureux ont même tenté la solution des phares laser, où les diodes conventionnelles sont remplacées par des unités émettant un faisceau laser ultra-lumineux. Pour des raisons de coût, les phares laser restent cependant anecdotiques : seule l’Audi R8 et la BMW i8 peuvent les recevoir. Et ces options restent hors de prix : près de 4 000 € pour l’Audi et 6 500 € pour la BMW !
Mais la prochaine révolution de l’éclairage automobile viendra sans doute de la technologie OLED. Les diodes OLED (pour « organic light-emitting diode ») sont déjà utilisées pour les téléphones mobiles et certaines télévisions à écran plat. De par leur apparence, elles diffèrent radicalement des diodes LED classiques : elles sont en effet constituées d’une superposition de sept couches, dont deux servant d’électrodes. Un courant continu est envoyé de la cathode à l’anode en passant au travers d’une couche émettrice de lumière. Les diodes OLED sont ultrafines (quelques micromètres d’épaisseur), émettent une lumière cohérente sur toute leur surface, et sont même flexibles !
En clair, la technologie OLED ouvre un tout nouveau domaine d’exploration pour les designers, qui peuvent imaginer des effets tridimensionnels, voire de couvrir tout ou partie de la carrosserie de diodes OLED pour une impression visuelle spectaculaire. Les poignées de portières classiques pourraient par exemple être remplacées par des zones tactiles matérialisées par des guides lumineux à la surface de la carrosserie. En clair, tout est possible ! Les premières applications d’éclairages OLED en grande série ne devraient plus tarder, et Audi pourrait bien être le premier à ouvrir les hostilités. Gageons qu’après la vogue très 2005 des « moustaches » à LED, les feux ultracomplexes à OLED seront la grande mode de 2020 !