Selon Lotus, faire plus léger ne revient pas plus cher !

L'usine Lotus à Hethel

L’usine Lotus à Hethel

Quand des spécialistes historiques du « light is right » parlent d’allègement, on les écoute. Les membres du California Air Resources Board (CARB) ont donc frappé à la bonne porte en demandant à Lotus Engineering de travailler sur un projet de véhicule léger : les ingénieurs du très réputé bureau d’études de Hethel ont analysé de A à Z comment retirer des kilos à un bon gros crossover des familles. Résultat prévisible : Lotus a réussi à réduire le poids de 31 % à rigidité structurelle équivalente. Autre résultat de l’étude, moins attendu celui-là : produire plus léger avec des matériaux exotiques ne reviendrait pas plus cher !

Antoine de Saint-Exupéry écrivait dans Terre des Hommes : « La perfection est atteinte, non pas lorsqu’il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer. » Une citation en forme de leitmotiv pour ce passionné d’aviation, mais que Lotus aurait tout aussi bien pu reprendre à son compte. Depuis Colin Chapman et son obsession du « light is right », le constructeur de Hethel a fait de la légèreté une marque de fabrique.

Alors forcément, quand le California Air Resources Board (CARB, équivalent californien de notre Ademe) a voulu explorer le domaine des possibles en matière d’allègement d’un véhicule grand public, l’organisme s’est adressé au bureau d’études Lotus, réputé pour être l’un des meilleurs au monde. La mission confiée à la firme britannique était simple : prendre pour base un crossover familial grand public (en l’occurrence, un Toyota Venza, modèle distribué uniquement en Amérique du Nord), et étudier comment en réduire la masse tout en restant dans le domaine du réalisme, que ce soit en termes de prix de revient ou de procédés de fabrication.

Toyota Venza (2010)

Toyota Venza (2010)

Les ingénieurs Lotus ont donc fait fonctionner cellules grises, simulateurs et calculatrices. Ils ont littéralement désossé l’auto afin de traquer le moindre gramme superflu. D’abord en adoptant des matériaux nouvelle génération : l’aluminium pour l’essentiel de la caisse en blanc, l’acier pour les pieds milieux, le magnésium pour la zone de déformation avant et les composites pour le plancher.

La caisse en blanc est faite d'aluminium (en gris), d'acier (en rouge), de magnésium (en violet) et de composites (en bleu).

La caisse en blanc est faite d’aluminium (en gris), d’acier (en rouge), de magnésium (en violet) et de composites (en bleu).

Mais les cerveaux de Hethel ont également veillé à dimensionner précisément chaque élément, afin d’éviter de mettre trop de matière aux endroits inutiles. Chaque pièce a également été conçue de manière à avoir un rôle structurel. Enfin, les composants affichent un haut niveau d’intégration, ce qui permet de réduire le nombre de pièces (passé de 269 à 169 dans la caisse en blanc).

Le Toyota Venza revu et allégé par Lotus Engineering.

Le Toyota Venza revu et allégé par Lotus Engineering.

Au final, les ingénieurs Lotus ont abouti à une réduction de 131 kilos (soit 37 %) de la masse de la coque, auxquels s’ajoutent 386 kilos économisés dans l’habitacle, au niveau des suspensions, des ouvrants ou encore du châssis. Après ce régime Weight Watchers, le Toyota Venza amaigri par Lotus est 527 kilos plus léger que le modèle normal, soit un gain de masse de 31 %. Le gain de poids est par ailleurs un cercle vertueux : un véhicule plus léger se contentera d’un moteur plus petit, de pneus moins larges et de bras de suspensions moins lourds, autant d’éléments qui induisent à leur tour un nouvel allègement.

Simulation de crash-test afin de valider les choix structurels.

Simulation de crash-test afin de valider les choix structurels.

Bref, les gars de Hethel auraient pu en rester là, et se taper dans le dos en débouchant une bonne bouteille. Mais ils ont continué le travail avec à l’esprit l’hypothèse d’une mise en production du modèle allégé. Ils ont manipulé des tonnes de tableaux Excel, évalué le coût de production de chaque pièce, évalué l’outillage et la main d’œuvre nécessaire. Ils ont été jusqu’à dessiner les plans de la chaîne de montage ! Un travail de titan qui force le respect.

Ils ont tout étudié, jusqu'aux plans de la chaîne de montage !

Ils ont tout étudié, jusqu’aux plans de la chaîne de montage !

Il découle de cette étude approfondie que si la coque en blanc coûterait 160 % plus cher qu’une coque normale, le processus de production se contente d’un outillage moins lourd et permet de réduire les chutes de matériau. En outre, la réduction drastique du nombre de pièces représente lui aussi une source d’économies. Au global, en comptant la construction d’un nouvel atelier et son amortissement sur 3 ans, le Toyota Venza allégé reviendrait… 1 % moins cher que le modèle normal !

Le Toyota Venza revu et allégé par Lotus Engineering.

Le Toyota Venza revu et allégé par Lotus Engineering.

Cette étude illustre de façon frappante la marge de manoeuvre dont disposent encore les constructeurs pour alléger leurs véhicules (en kilos de masse comme en grammes de CO2 !). Elle suscite cependant une réserve : le modèle économique a été validé pour une cadence de production de 60 000 voitures par an, ce qui est assez peu (BMW produit plus de 400 000 Série 3 chaque année)…

PS : les plus courageux liront l’épais rapport remis par Lotus Engineering au CARB (450 pages en anglais !)

PPS : ceci était mon dernier billet de l’année. J’aurai le plaisir de vous retrouver en 2013 pour de nouvelles aventures bloguesques, et vous souhaite en attendant d’excellentes fêtes 🙂

13 thoughts on “Selon Lotus, faire plus léger ne revient pas plus cher !

  1. Il est classe en plus leur monospace, il faudrait que Toyota l’adopte (après tout ils fournissent déjà des moteurs à Lotus).
    Dommage aussi qu’ils ne nous communiquent pas les gains théoriques en terme de consommation, de performance. Mais la démarche est intéressante.
    Pour chipoter, les ingénieurs de Lotus auraient pu bosser un peu plus sur l’Evora, par exemple, qui n’est pas une ballerine (quasi le même poids qu’une 911 avec un niveau de finition bien inférieur) plutôt que donner des leçons, mais c’est vraiment pour chipoter :-).

  2. Sans parler des performances dynamiques et de l’amélioration des distances de freinage.
    Avant d’alourdir nos voitures de dispositifs tous plus nombreux pour soi-disant ajouter de la sécurité passive en diminuant la responsabilité des conducteurs, revenons à des voitures simples mais efficaces. Faites conduire une Elise à n’importe quel conducteur et vous saurez immédiatement à la largeur de la banane affichée combien il sera plus attentif à son volant qu’au volant de son SUV lourdingue.

  3. cela fait longtemps que je deplore la disproportion d’un véhicule par rapport aux personnes transportés… rien que le poids des sièges! il n’y a plus de voitures style 2 CV ou 4L. on nous vend un tas de produits electroniques et de ‘sécurité’ qui alourdissent les véhicules sans apporter grand chose qu’une plus grosse marge de benefices pour les constructeurs et les garagistes qui doivent reparer ou échanger ces gadgets (qui tombennt en panne) à prix d’or. à quand une voiture minimaliste, pas chère et fiable?

  4. Depuis 6-7 ans les voitures qui arrivent sur le marché sont toutes plus légères que leurs prédécesseures (enfin, surtout les allemandes et Mini)

    Dans le même temps, la population continue de grossir, de s’alourdir

    Ca s’équilibre, donc 😉

  5. Bonjour !
    La partie plane du toit gagnerait encore qq Kg en technologie CF-sandwich.
    La chaîne de montage présentée comporte probablement un four en continu ( style grande prod. de pain .. ) pour ponter ce temps mort autoclave.
    Cette technologie serait à portée d’un « start up » équipementié auto &/\ avionic, avec une bonne valeur ajoutée & faible risque de délocalisation par haute qualification du personnel.
    Les ténors de l’auto doivent d’abord amortir leur chaîne de montage en monocoque acier, d’où une grande inertie.
    L’alu demande 5 X plus d’énergie à sa production (2X en recyclé), donc un mauvais bilan CO2, mais ceci nettement compensé par un durée de vie double (~20 an/corrosion).
    Il n’y a donc rien à ajouter ni retrancher à votre article, « light is right » dans tous les domaine .d_b.

  6. Hello Vincent !!

    Bel article et surtout bel exemple de ce que l’on peut faire quand on veut se donner la peine d’allier légèreté, qualité et efficacité !!!

    Bon Réveillon ! 😉

  7. >avec une bonne valeur ajoutée & faible risque de délocalisation par haute qualification du personnel.

    Bullshit…les gens ne sont pas plus cons ailleurs.

  8. @:STEPHANE> Sans faire du _cocorico-F../+hop+Suisse+…/D-über-alles/EU-norme>>..,
    désolé de vous contredire !
    On sait en effet que le contexte chinois, pour ex., ne laisse pas grande chance à la créativité et la qualité de produits innovants . SWATCH comme ROLEX & HUBLOT ont choisi le Swiss-Made < , et sans vouloir vous faire la leçon, les Suisses ne sont pas trop intéressés à cette mode Monopoly-financière de délocalisation vers des pays-esclaves, car :
    <_1°_ Éthiquement , <_2°_ Le CO2 dû au transport , <_3°_ À long termes, les calculs montrent que sans support de haute qualification, le produit meurt 2 à trois fois plus vite , tout à recommencer, faillite etc..:
    Donc un choix de dupe, sauf que le C.E.O s'encaisse plus de primes juteuses & s'évapore quand ça baisse , et se délocalise.., logo ?

    ! L à d' a c c o r d , o n e s t p l u s " C°N / N A I F " q u e l e s a u t r e s !

    À NOTER p.ex., que Japon, Brésil & même Cuba, soignent fortement le niveau des écoles techniques & scientifiques et , il n'y a pas de hasard :
    Les retombées suivent ! , regardez donc l'évolution des PIB, (revenu moyen par habitants) , ce n'est pas de la politique G7/20.. etc.*.., mais simplement moins de pauvreté et moins de trop-trop riche & con quand même.
    À PROPOS, Mr Steve Job's bossait gratis pour Apple , le saviez-vous ? -d_b-MMXIII°-

  9. je voie bien une erreur dans l’article :
    je doute que chez lotus l’on bosse avec EXEL ….

    bel article , le bureau californien a eu le nez creu en prenant un véhicule lambda car ainsi l’on voie bien les progrès qui devrais être fait sur nos véhicules .

  10. ! Oui bel article & bravo à l’équipe Lotus R&D !
    – LA VRAIE QUESTION EST:
    – LA FONCTION OU LA MODE ..
    >> Sommes-nous tout simplement prêt
    à investir deux fois plus cher
    ou plus simple mais une durée de vie double & entretien, huile essence .. de moitié (5-10 ans pour une automobile .. vélo idem ..) >> deux à trois fois plus grande !
    Malgré les normes de bonnes intentions €U de CO2 ..
    La Deuche revient à la mode sans pub & marketing :
    s.e.: 4 litres au cent réel , pour une demi tonne à vide ..?
    ing.d_b

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