Boîtes à 8, 9, 10 rapports… Jusqu’où iront-ils ?

Une Mercedes dotée de la boîte 7G-Tronic

Une Mercedes dotée de la boîte 7G-Tronic

Il fut un temps – pas si lointain – où disposer d’une boîte à 5 vitesses était un signe de modernité absolue, au point d’être parfois mis en avant par un monogramme apposé sur la malle arrière ou la calandre. Puis la « boîte 6 » vint démoder la « 5 », avant que Mercedes n’invente une transmission automatique à 7 rapports. Depuis, c’est l’inflation : les boîtes 8 se multiplient, tandis que les constructeurs évoquent déjà de futures 9 et même 10 vitesses ! Jusqu’où cela ira-t-il ? Nos autos disposeront-elles bientôt de transmissions à 11 ou 12 rapports ? Pas si sûr !

Flash-back : dans l’après-guerre, la norme était à la boîte à… trois vitesses. Une première pour démarrer, une seconde pour la ville, une troisième pour la route. Cela suffisait bien : à l’époque, les autoroutes étaient rarissimes, et même les sportives les plus radicales et modernes, comme la Mercedes 300 SL, se contentaient d’une boîte 4.

Renault 4CV, lancée en 1947 : seulement 3 vitesses... mais quasiment aucune autoroute !

Renault 4CV, lancée en 1947 : seulement 3 vitesses… mais quasiment aucune autoroute !

Rappelons à tout hasard que la nécessité d’un système de réduction s’est rapidement imposée dès les balbutiements de l’automobile. En effet, le moteur thermique ne s’épanouit qu’à des régimes de rotation élevés, incompatibles avec les phases de démarrage et de roulage à basse vitesse. Par la suite, le développement d’un réseau de voies rapides a nécessité la mise en œuvre de rapports surmultipliés (« overdrive ») qui permettaient d’abaisser niveau sonore et consommation sur les longs trajets. Au fil des années, la boîte 5 est devenue la norme, la boîte 6 restant l’exception, réservée aux modèles sportifs, ainsi qu’à certaines versions diesel à la plage d’utilisation étroite.

Le développement des boîtes automatiques modernes a relancé cette course aux pignons. Mercedes a ouvert le feu dès 2003 avec sa 7G-Tronic, première transmission à 7 rapports disponible sur une automobile, suivi par beaucoup d’autres (Porsche, BMW, Volkswagen…). Plus récemment, l’équipementier allemand ZF a mis a disposition des constructeurs sa 8HP, une transmission automatique à convertisseur comptant… 8 vitesses. Audi, BMW, Porsche, Jaguar ou encore Land Rover en font leurs choux gras.

Le Porsche Cayenne Turbo S est doté de la boîte ZF à huit rapports

Le Porsche Cayenne Turbo S est doté de la boîte ZF à huit rapports

Pourquoi une telle frénésie ? Parce que ces boîtes automatiques d’un nouveau genre permettent d’abaisser sensiblement la consommation et les émissions de CO2, sujet devenu très sensible aux quatre coins du globe, avec des normes antipollution de plus en plus drastiques. Augmenter le nombre de vitesses permet de se rapprocher du régime idéal auquel le moteur donne le meilleur de lui-même, sans forcer en sous-régime, ni « mouliner » pour rien.

La boîte ZF 8HP (utilisée par BMW et Audi)

La boîte ZF 8HP

De plus, en multipliant les rapports (de boîte, je vous vois venir, bande de coquinous !) on augmente « l’ouverture », c’est à dire le rapport entre la démultiplication la plus courte et la plus longue. Ce qui permet d’avoir à la fois une première courte pour des démarrages nerveux, et une 7e ou 8e longue pour les parcours autoroutiers à vitesse stabilisée. Enfin, avoir un plus grand nombre de pignons dans la boîte permet de lisser les changements de vitesse, le saut de régime nécessaire pour passer de l’une à l’autre étant réduit.

Même la petite BMW Série 1 a le droit à une boîte auto 8 rapports !

Même la petite BMW Série 1 a le droit à une boîte auto 8 rapports !

Autant dire que les constructeurs et équipementiers n’entendent pas s’arrêter à 8 rapports : ZF a déjà en magasin une 9HP qui, vous l’aurez compris, compte neuf vitesses. Elle sera inaugurée par des modèles Chrysler et Dodge dès l’an prochain. De la même manière, Mercedes travaille sur une « 9G-Tronic ». Mais ce n’est pas tout : les ennemis jurés Ford et General Motors ont décidé de développer en commun des boîtes à 9 et… 10 rapports, qui devraient apparaître en 2015 ! Le coréen Hyundai-Kia a le même genre de projet dans ses cartons.

La boîte ZF 9HP

La boîte ZF 9HP

Pour autant, on semble atteindre là un maximum technologique. Car augmenter le nombre de rapports d’une boîte, c’est ajouter des frottements supplémentaires, des coûts de développement et de fabrication, de la complexité… et des risques en matière de fiabilité. En outre, cette course à l’échalote ne concerne que les boîtes automatiques : on imagine mal le conducteur lambda se dépêtrer avec une triple ou quadruple grille en H !

18 thoughts on “Boîtes à 8, 9, 10 rapports… Jusqu’où iront-ils ?

  1. « on imagine mal le conducteur lambda se dépêtrer avec une triple ou quadruple grille en H ! »
    Et pourtant les conducteurs de poids lourds le font depuis des années déjà avec des boites à étage 2X4 doublée par un relais( demi vitesse) soit 16 rapports !

  2. Merci pour ce passionnant article, pour moi qui ai bien connu les « boite auto » américaines à 2 (deux) vitesses seulement ! (nous étions en 1948..)

    Il faut dire que le couple d’un V8 essence de l’époque, où le moteur de 6 litres de cylindrée ne délivrait que 140 ch permettait ce délire…Le Convertisseur hydraulique de couple encaissait tout, au prix d’une consommation de carburant jamais inférieure à 20 litres aux cents…

  3. Petites corrections: Les premières boites à 8 rapports on été introduites par Aisin AW sur Lexus dès 2006, 3 ans avant les ZF 8HP. Les boites auto Porsche proviennent également d’Aisin AW, comme la majorité des versions VW et Audi.

  4. on remarque quand même que le besoin d’un grand nombre de rapports est bien plus présent sur les grosses voiture/SUV alors que pour une baisse de la consommation une voiture plus petite est bien plus efficace …
    La course aux faible émissions de CO2/particules étant pratiquement inutile car faire baisser la conso implique forcément une réduction des rejets alors que l’inverse n’est pas toujours vrais …( essayez une voiture diesel récente sans fap ni catalyseur, la différence de consommation est impressionnante …)

    et la voiture électrique elle n’a même pas besoin de vitesses , les boites à grand nombre de rapport risque donc de ne pas avoir une très grande durée de vie commercial …

  5. intéressant, pourtant, il y a tellement plus simple: une boite cvt, avec laquelle on a des rapports infinis et qui est, en plus, plus compacte et donc plus legere…

    • Bonsoir,

      Les boîtes CVT posent un gros problème : elles sont inadaptées aux moteur à couple important. Même Audi et Nissan, grands spécialistes avec leurs Multitronic et autres Extroïd-CVT, n’arrivent pas à franchir la barre des 350 Nm.

      Et puis leur comportement est déroutant pour l’utilisateur non habitué. Enfin, le rendement énergétique des dernières boîtes automatiques (à convertisseur ou à double embrayage) est désormais supérieur à celui des CVT.

      V. Desmonts

  6. Les boites CVT sont inadaptées aux moteurs à couple important ???????????

    La quasi totalité des tracteurs agricoles actuels sont équipés de boite CVT connue en agricole sous le nom de VARIO.
    Le couple d’un tracteur dépasse allègrement les 350Nm sachant par exemple qu’un Case de 200 ch a un moteur de 6 cylindres en ligne avec une cylindrée de 8200CC développe 800Nm d’origine et souvent plus de 1000Nm après reprogrammation.

    Il faut bien çà pour décoller 40 à 50 Tonnes au sol à un carrefour

    La souplesse et la simplicité de cette boite est hallucinante l’accélérateur du tracteur ne sert plus d’accélérateur a proprement parler pour augmenter le régime moteur mais sert de variateur de vitesse et le régime moteur est gérer automatiquement.

    Par exemple lors d’un démarrage tant que la vitesse souhaitée n’est pas atteinte le régime moteur monte à 50% jusqu’à 100% et une fois lancé le régime moteur peut descendre jusqu’à 30-35% d’où d’énorme économie de carburant. Imaginé votre voiture avec ce type de boite vous êtes à 120 ou même plus sur autoroute et le régime moteur reste constamment à 1200-1300 trs/min.

    Vous couplez cela à un bon calculateur électronique avec un cruise contrôle et comme les tracteur vous choisissez votre vitesse désirée avec un bouton plus et moins pour des vitesse allant de 0,1 km/h à … la limite de la boite.

    J’ai déjà conduit avec des dizaines de boite différentes de la boite fuller à double débrayage à la boite manuelle en passant par la boite automatique classique et la boite manuelle robotisée TYPE DSG sans oublié la boite hydrostatique et les boites multitronic mais de toute les boites, la boite CVT c’est vraiment le top par contre c’est vrai qu’il faut s’y faire au début mais après dur de revenir à la boite manuelle.

    J’en viens presque à préférer la conduite en tracteur avec une boite CVT que la conduite de mon audi boite 6 manuelle même si c’est une V6

  7. Bonjour Olivier,

    La transmission CVT que vous évoquez sur le tracteur est sans doute du type hydrostatique. Ces boîtes supportent effectivement un couple élevé, mais au prix d’énormes pertes par friction (un peu comme un énorme convertisseur de couple sur une boîte auto hydraulique). En outre, permettent-elles la même finesse de dosage de la réponse à l’accélérateur ? Vu comment les tracteurs ont tendance à démarrer brutalement, j’en doute…

  8. « Et puis leur comportement est déroutant pour l’utilisateur non habitué.  »
    Le frein aux transmissions continues est sans doute plus dans la culture que dans la technique.
    Jusque dans les années 80, les Français étaient allergiques aux BVA, pourtant très répandues dans d’autres pays. On avait l’impression de régresser au retour d’un séjour aux USA en reprenant le volant d’une auto d’ici (idem pour les cruise control, les vitres électriques, etc.)
    Finalement, ils se sont rendus à l’évidence, c’est plus pratique et plus confortable.
    Les BVM à 6 ou 7 vitesses, les conducteurs en reviendront (quel enfer dans une conduite au quotidien…)
    Et entre une BVA à plus de 6 vitesses et une transmission continue, on imagine bien que le coût et la fiabilité pousseront à terme vers du continu, quitte à rendre cette technologie encore plus performante.
    Enfin, ce n’est que mon avis…

  9. Il faudrait plutot que ce soit le régime moteur qui soit réglable par bouton/manette avec kes rapports infinis pour la boîte. Exemple : je veux démarrer je selectionne 2500 tr min ensuite en ville 2250 pour avoir de ka nervosité departementale 1800 et j arrive sur autoroute 1300 tours.

  10. Pourquoi pas une transmission électrique entre le moteur thermique et les roues: le moteur entraîne un alternateur qui alimente des moteurs électriques. Il y a même des systèmes plus compacts en électrotechnique.

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